Qu’est-ce qu’une escarre ?
L’escarre est une plaie chronique ischémique localisée de la peau et/ou du tissu sous-jacent recouvrant une saillie osseuse qui apparaît lors d’une position prolongée, assise ou allongée, qui crée une pression sur des zones d’appui. Cette pression comprime alors les tissus entre deux plans durs et empêche le sang d’affluer normalement entraînant une diminution de l’apport en oxygène, responsable de la dégradation de ces tissus où la plaie finit par se développer parfois en quelques heures seulement.
Dans 80% des cas, l’escarre apparaît au niveau du sacrum ou du talon, principales zones d’appui des patients à mobilité réduite ou nulle. Cette plaie peut également survenir au niveau des coudes, du trochanter, du pied/de la cheville, ou à l’arrière du crâne.
Les différents stades de l’escarre
Les escarres sont classées par stade selon leur gravité.
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Stade 1
Rougeur persistante. L’escarre stade 1 est une rougeur qui apparaît et qui ne disparaît pas à la pression. La peau n’est pas encore rompue, il n’existe pas encore de plaie. Il peut y avoir des modifications de la peau adjacente, avec une modification de la température de la peau ou de la consistance du tissu. Des douleurs peuvent être ressenties. À ce stade, des soins spécifiques doivent être instaurés. Dans ce cas, il est recommandé de ne plus masser la zone au risque d’aggraver l’affection.
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Stade 2
A ce stade de l’escarre, il y a une perte de substance impliquant l’épiderme et en partie le derme. Il peut s’agir d’une ulcération superficielle ou d’une phlyctène (dans ce cas il y a décollement de l’épiderme).
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Stade 3
L’épiderme, le derme et l’hypoderme sont atteints. La perte de substance implique le tissu sous cutané. La présence de tissus nécrosés (noirs) et de croûtes. Attention : l’escarre paraît toujours plus infime en surface que ce qu’elle n’est en profondeur.
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Stade 4
Escarre profonde. Perte de substance atteignant ou dépassant le fascia et pouvant impliquer les os, articulations, muscles ou tendons.
Les symptômes des escarres
Les escarres se manifestent par une variété de symptômes, allant de la rougeur initiale de la peau à des lésions plus graves.
Rougeur de la peau : Au début, une rougeur de la peau sur les zones d’appui (en regard des saillies osseuses), qui ne disparaît pas lorsqu’on appuie dessus, peut être un signe précoce d’une escarre à son stade initial (stade I). Chez les personnes à la peau pigmentée, il peut s’agir d’un changement de couleur (assombrissement, éclaircissement ou décoloration gris/bleu/violet) plutôt qu’une rougeur.
Changement de température ou de texture de la peau : La peau touchée peut sembler plus chaude, plus fraîche, plus dure ou plus tendre que la peau environnante. Pour les peaux pigmentées, la palpation régulière de l’état cutané permet d’examiner les zones à risques et de détecter tout signe précoce d’altération cutanée.
Plaies ou lésions cutanées : Les escarres peuvent se manifester sous forme de plaies superficielles, d’ampoules, d’érosions cutanées ou d’ulcérations plus profondes.
Douleur : Les escarres peuvent être douloureuses, dès les premiers stades, car les terminaisons nerveuses se trouvent sur la peau. Cependant, dans certains cas, en particulier lorsque les nerfs sont endommagés, la douleur peut être moins perceptible.
Odeur désagréable : Les escarres peuvent dégager une odeur désagréable en raison de l’infection des tissus.
Perte de sensation : Dans les cas où les nerfs sont affectés, la personne peut ressentir une perte de sensation dans la zone touchée.
Tissu mort ou nécrosé : Dans les stades avancés, les escarres peuvent présenter du tissu mort (nécrose) visible dans la plaie.
Il est essentiel de surveiller régulièrement la peau des personnes à risque d’escarres, en particulier celles qui sont immobiles ou confinées au lit. La détection précoce des escarres et la prise en charge appropriée sont cruciales pour prévenir les complications graves.
Les causes d’apparition des escarres
Les escarres se forment principalement en raison d’une pression prolongée exercée sur la peau, en particulier dans les zones où les os sont proches de la surface de la peau. Les principaux facteurs de risque incluent :
Pression prolongée : La pression continue sur une zone de la peau, souvent due à une immobilité prolongée, empêche la circulation sanguine normale, ce qui entraîne une diminution de l’apport en oxygène et en nutriments dans la peau et les tissus sous-jacents (défaut d’oxygénation, accumulation de toxines, diminution du pH). Une déformation mécanique des tissus mous (rupture de la membrane, perméabilité, dégradation du cytosquelette) peut également se produire.
Cisaillement : Le cisaillement résulte du glissement et de l’étirement des couches cutanées et sous-cutanées les unes sur les autres, par exemple le corps en position semi-assise glissant vers le bas.
Frottement : Le frottement entre la peau et une surface dure, telle qu’un matelas ou un siège de chaise, peut endommager la couche superficielle de la peau par une abrasion mécanique de la peau.
Humidité : La peau humide due à la transpiration, à l’urine ou à d’autres liquides corporels peut ramollir la peau, la rendant plus vulnérable aux dommages et à l’irritation.
Manque de mobilité : Les personnes qui ont une mobilité limitée ou qui sont confinées au lit ou à un fauteuil roulant sont plus sujettes aux escarres, car elles sont moins capables de changer de position pour soulager la pression sur leur peau.
Mauvaise nutrition : Une mauvaise alimentation peut entraîner une diminution de la cicatrisation et une réduction de la résistance de la peau aux lésions.
Âge avancé : Les personnes âgées de plus de 70 ans ont souvent un mauvais état cutané, avec une peau plus fine et moins élastique liée au vieillissement physiologique, ils peuvent également être dans un état carentiel ou sous corticothérapie au long cours..
Troubles médicaux : Des conditions médicales telles que le diabète, les troubles cardio-vasculaires, l’incontinence, les troubles neurologiques et les maladies chroniques peuvent augmenter le risque de formation d’escarres en affaiblissant la peau et en compromettant la circulation sanguine.
La prévention des escarres implique généralement la réduction de la pression sur la peau par la mobilisation, le changement de position régulier, des supports thérapeutiques, le maintien d’une peau propre et sèche, une nutrition adéquate et des soins cutanés appropriés.
Les facteurs qui favorisent l’apparition de l’escarre
Comprendre les facteurs qui favorisent l’apparition des escarres est essentiel pour mettre en place des stratégies efficaces de prévention et de prise en charge de ces blessures cutanées débilitantes. Plusieurs facteurs peuvent favoriser l’apparition des escarres, notamment :
- L’immobilité
- L’âge du patient. Si l’escarre peut aussi concerner les enfants, les patients de plus de 70 ans sont particulièrement exposés.
- La dénutrition
- La qualité de la peau. En effet, plus celle-ci est fine, plus elle est sensible aux frottements, aux cisaillements et aux pressions.
- L’incontinence, qui entretient une humidité permanente et fragilise les tissus en raison d’une macération.
- Une altération de la motricité et un manque de mobilisation.
- Une altération de la sensibilité. Le patient (parfois atteint de troubles neurologiques) n’éprouve aucune douleur et n’a pas le réflexe de changer de position.
Le traitement des escarres
Quel que soit le stade de l’escarre, un traitement doit être instauré au plus vite.
Le type de prise en charge dépend du stade de l’escarre (lésion réversible ou irréversible), mais reste la plupart du temps synonyme de guérison.
D’abord, s’il existe une lésion visible, celle-ci devra être protégée par un pansement adapté
En cas d’atteinte de l’épiderme et du derme, le personnel soignant procédera à des soins de nettoyage et de cicatrisation.
Quel que soit le degré de gravité de l’escarre, le premier geste est de lever/soulager la pression. Par exemple, par un changement de position du patient toutes les 2 à 3 heures. Enfin, l’installation d’un lit spécialisé, d’un matelas spécifique (en mousse, à eau, à air…) et de coussins, permettra de soulager et de répartir les pressions au niveau des zones à risque. De plus, tout traitement devra s’accompagner d’une prise en charge nutritionnelle adaptée et de la prise en charge des différentes comorbidités.
Quelles sont les complications des escarres possibles ?
Les escarres peuvent entraîner plusieurs complications, notamment :
Infections : Les escarres augmentent le risque d’infections localisées bactériennes, virales ou fongiques, car la peau endommagée offre un terrain propice à la prolifération des microbes. Des complications plus étendues (autour de la plaie) comme l’érysipèle ou l’eczéma sont également des complications possibles aux escarres.
Septicémie : Une infection non traitée peut se propager dans le sang, entraînant une septicémie, une infection généralisée potentiellement mortelle.
Retard de cicatrisation : Les escarres peuvent retarder la cicatrisation, en particulier chez les personnes atteintes de maladies sous-jacentes telles que le diabète ou les problèmes circulatoires.
Douleur : Les escarres peuvent être extrêmement douloureuses, entraînant un inconfort constant et altérant la qualité de vie.
Dégradation de l’état de santé : Les complications des escarres peuvent affaiblir le système immunitaire et aggraver d’autres conditions médicales sous-jacentes, ce qui peut entraîner une détérioration générale de l’état de santé.
Hospitalisation prolongée : Les complications graves des escarres peuvent nécessiter une hospitalisation prolongée, ce qui augmente le risque d’autres problèmes de santé liés à l’immobilité et à l’environnement hospitalier.
Il est donc crucial de prévenir les escarres autant que possible et de les traiter rapidement dès leur apparition pour réduire le risque de complications graves. Cela implique généralement la mise en œuvre de mesures préventives telles que la rotation régulière des positions, le maintien d’une peau propre et sèche, une nutrition adéquate et des soins cutanés appropriés.
Comment prévenir l’apparition d’escarre ?
Enfin, lorsque l’on sait que 2 heures sans bouger peuvent suffire à créer une escarre, ces quelques gestes préventifs seront utiles tant au patient qu’à son entourage :
- Examiner systématiquement les zones du corps sur lesquelles une escarre est susceptible de se développer (zones d’appui).
- Mobiliser le patient, quitte à solliciter une infirmière ou un kinésithérapeute.
- Effectuer une toilette complète au moins 1 fois par jour et une toilette périnéale chaque fois que le patient est souillé.
- Éviter l’utilisation de tissus rêches pour sécher la peau.
- Procéder au changement des draps quotidiennement.