Nathalie, infirmière libérale,
permet à son patient de relancer la partie.
Jeudi 23, 9h15, Provence-Alpes-Côte d'Azur
Ce matin, Nathalie débute sa journée en rendant visite à Monsieur L., un retraité diabétique de plus de 60 ans souffrant notamment de neuropathie diabétique de grade 3.
Découvrez comment Nathalie est parvenue à gérer cette situation : son interview ainsi que ses conseils et astuces pour une cicatrisation couronnée de succès !
L'INTERVIEW DE... Nathalie
le 23 mars 2023
Aujourd'hui, nous avons le plaisir d'interviewer Nathalie, infirmière libérale puéricultrice depuis 30 ans, titulaire d'un DU Plaies et Cicatrisation et d'un DU en Diabétologie et éducation thérapeutique, terminant prochainement la formation du Diplôme d'Etat IPA (Infirmière en Pratique Avancée).
Bonjour Nathalie. Aujourd’hui, tu souhaitais nous partager un cas clinique, peux-tu nous en dire un peu plus sur ton patient : son âge, les caractéristiques de sa plaie ?
Bonjour.
je souhaitais vous parler de Monsieur L., un patient polypathologique. C’est un retraité septuagénaire qui consomme de l'alcool et fume. Il souffre notamment d’une neuropathie diabétique de grade 3, en plus d'autres maladies chroniques... Un écho-doppler a révélé une AOMI – Artériopathie Oblitérante des Membres Inférieurs avec un IPS – Index de Pression Systolique inférieur à 0,9.
J'ai donc pris en charge ce monsieur à la suite d’une autre équipe, pour des plaies chroniques et nécrotiques au niveau des orteils, qui ont été traitées par un premier pansement sans évolution favorable et ont nécessité une orientation urgente vers le médecin traitant et des spécialistes.
Quel protocole de soins a été mis en place ?
Pour commencer, c’est un patient qui a déjà plusieurs traitements pour ses différentes maladies. Au niveau de son dernier bilan sanguin : il a une hémoglobine glyquée, une glycémie ainsi qu'un cholestérol trop élevé. Alors quand on découvre les plaies, on se pose tout de suite la question sur comment atteindre une cicatrisation sur des plaies aussi nécrosées.
Dans un premier temps, sur le plan local, on a réalisé une détersion manuelle, mais on avait encore beaucoup de fibrine et pas du tout de bourgeonnement. On a également voulu rééquilibrer au plus vite sa glycémie pour être dans des conditions favorables à la cicatrisation. Au vu de la faible évolution des plaies, on a contacté le médecin pour faire un écho-doppler afin d’évaluer l’état vasculaire au niveau du pied de Monsieur L. Au final, une amputation d'un orteil a dû être réalisée. Lors de son retour à domicile, on est parti sur une combinaison de pansements adaptés à la situation du patient. On gardait quand même un terrain peu favorable et qui ralentissait la cicatrisation avec l’alcool et le tabac, donc on a travaillé sur ces problématiques dans un second temps. Au bout de 1 mois, la consommation d’alcool a été réduite petit à petit grâce à un gros travail de guidance et de coaching. Sur le versant du tabac, le patient est passé d’un paquet par jour à seulement quelques cigarettes par jour, ce qui représente un effort énorme pour le patient, bien conscient de l’importance de ses efforts pour cicatriser, grâce à l’éducation thérapeutique que nous lui avons apportée.
On a également mis en place une chaussure de décharge pour que le patient puisse se déplacer parce qu’il avait vraiment envie de sortir de chez lui et de continuer à vaquer à ses occupations personnelles.
Quel a été l’impact des plaies et de la cicatrisation sur le quotidien du patient ?
Avant la cicatrisation, le patient ne pouvait quasiment plus rien faire. En premier lieu, Monsieur L. a retrouvé un bilan sanguin favorable et grâce à la cicatrisation, il a pu de nouveau faire ses activités avec ses amis. On avait convenu avec lui qu’au niveau de la boisson, il se limiterait à un verre avec ses amis, ce qui a été respecté et confirmé par un bilan hépatique tout à fait correct d’ailleurs.
Au total, ça a pris 3 mois et on a fait des compromis avec le patient pour atteindre une cicatrisation, lui faire accepter la prise en charge tout en le laissant vivre à côté. Sur le plan alimentaire, on a bien travaillé également pour retrouver un bon équilibre glycémique, le tout en lien avec son épouse qui a été totalement investie dans cette évolution alimentaire et plus globalement dans la prise en charge.
Pourquoi as-tu choisi de nous raconter ce cas plutôt qu’un autre ?
Car c’est un patient complexe, polypathologique et que sa prise en charge a nécessité des compétences multiples. Des compétences cliniques bien sûr, avec un contexte médical intéressant et plusieurs pathologies liées les unes aux autres. Des compétences de coaching qui sont extrêmement importantes et nécessaires pour arriver à une acceptation du patient et une cicatrisation, et surtout éviter une récidive. En effet, le patient ayant déjà subi des amputations, s’il souhaite continuer ses activités physiques et voir ses amis, il faut absolument éviter une autre amputation. Enfin, des compétences de coordination pour faire le lien entre le médecin traitant, les spécialistes, le pédicure-podologue, … On n’a pas eu l’intervention d’une diététicienne car la famille était très ouverte pour modifier leur alimentation, mais on aurait parfaitement pu demander. On s’est posé la question à un moment de faire appel à un psychologue, mais le patient a refusé cette prise en charge. Voilà, un vrai travail de coordination et de réactivité dans une prise en charge pluridisciplinaire.
Un grand merci Nathalie pour ce partage !
Vous souhaitez avoir plus de détails sur la prise en charge ou les produits utilisés par Nathalie pour le traitement de ce patient en particulier ? Découvrez ce contenu en ouvrant les documents dans la rubrique "Envie d'aller plus loin ?" plus haut sur cette page !
Les Trucs et Astuces
Les conseils de Nathalie pour une cicatrisation couronnée de succès
RÉALISER UNE PRISE EN CHARGE ÉTIOLOGIQUE
« Dans le cas des patients diabétiques, il est indispensable d’équilibrer la glycémie pour être dans des conditions favorables à la cicatrisation. Cela repose aussi sur une bonne alimentation et peut nécessiter de faire appel à un diététicien. Enfin, la décharge est indispensable à la cicatrisation, elle permet également au patient de rester mobile, une chaussure de décharge lui facilitera ses déplacements.
ÉDUQUER LE PATIENT SUR SES FACTEURS DE RISQUE
« Il est important d’informer les patients des comportements qui peuvent mettre en péril la cicatrisation, comme une consommation excessive d’alcool et/ou de tabac ou encore une mauvaise alimentation. Il faut leur en faire prendre conscience, les conseiller et les accompagner dans le changement de leurs habitudes. »
COORDONNER LES DIFFÉRENTS ACTEURS IMPLIQUÉS DANS LA PRISE EN CHARGE
« En tant qu’infirmière, nous avons aussi un rôle de coordinatrice pour faire le lien entre les différents professionnels de santé impliqués : le médecin traitant, les spécialistes, mais aussi le diététicien ou le psychologue par exemple. »
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